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La première fois que je suis allé en Guinée, c’était en 2003 je crois. A l’époque j’étudiais déjà la polyrythmie depuis trois ans et naturellement j’ai eu envie de découvrir l’Afrique de l’ouest, de vivre et ressentir de plus près cette musique… Comme j’imagine un joueur de salsa ressent également le besoin de découvrir cuba… pour aller aux sources de ce qu’il pratique. J’étais fasciné par la dimension humaine de respect et d’écoute de celui qui apprend envers celui qui enseigne et connaît avec tout ce qu’implique «l’apprentissage oral».

Et puis j’ai trouvé de nombreux points communs avec le jazz, cette même musique que j’étudie avec passion depuis mon plus jeune âge. Comme par exemple le fait qu’un répertoire plus ou moins commun puisse permette à des gens qui ne se connaissent pas de directement communiquer ensemble sur des mêmes bases ; ou bien le fait que lorsqu’un musicien prends la parole et s’exprime à travers un solo, les autres l’accompagnent, le suivent et le poussent ; Avec en plus cette relation direct avec la danse, la terre et le corps.

J’ai rencontré en jouant dans la rue, en Ardèche, un ami dénommé Joseph Ruiz (Que je salue) qui m’a invité à le rejoindre en Guinée et plus précisément à Conakry. Apres avoir enfin réussi à récolter les fonds je suis parti. Il connaissait déjà bien la Guinée où il partait régulièrement étudier la percussion et le balafon sur des périodes de six mois. Il m’a très vite mis à l’aise et donné sa vision pertinente de ce pays. Je me souviens surtout qu’il parlait le soussou assez bien (une des nombreuses langues de Guinée, principalement parlée à Conakry et dans la région des « baga »). Du coup ça changeait tout sur les relations qu’il avait avec les Guinéens. Par exemple, il blaguait avec les vieilles tanties ou les enfants en soussou, ce qui ne manquait pas de susciter curiosité, rires et interrogations en tout genre. J’ai donc décidé moi aussi d’apprendre ce « langage qui change les relations ».

Il faut savoir que l’on peut très bien se faire comprendre en français qui est d’ailleurs la langue de l’école… Mais tous ne sont pas lettrés et surtout, faire l’effort d’échanger avec eux en soussou a je pense vraiment changé mon rapport aux gens. Il est indéniable connaissant les conditions économiques et politique de la Guinée, comme dans bien d’autres pays, qu’un « Foté » suscite un autre intérêt que celui de la rencontre de « l’autre ». Mais le fait d’étudier la langue m’a aidé je pense à construire des relations que je trouve fortes et vraies, basée sur l’amitié. Et je pense que ce facteur est important dans le fait que la Guinée m’ait profondément touché.

Depuis ce premier voyage, je suis retourné à de nombreuses reprises à Conakry, à des moments d’ailleurs très différents : de joies, de soulèvement et de colère de 2007, de renouveau en 2008, de crainte avec Daddis en 2009 et enfin d’espoir en ce moment avec les premières élections de 2010. Tous ces moments m’ont permis de mieux comprendre certaines réalités, certains enjeux.

Je me sens indigné de l’indifférence de l’opinion politique international à l’égard de ce pays, et plus principalement de ce peuple qui souffre et qui endure depuis tant d’années l’appétit acéré d’une poignée d’hommes attirés par le profit et le pouvoir... Ce pays où les vrais seuls bandits que j’ai rencontrés étaient les militaires (pas tous d’ailleurs, je salue d’ailleurs la gentillesse de Mr Zigla responsable du ballet Samâato).

Sorti de l’incroyable richesse artistique dont recèle la Guinée, j’ai été touché par ces gens, leurs sourires à toute épreuve, la force de leur foi, leur sens de l’hospitalité et des valeurs, qui prend un plus grand sens encore quand on connaît leurs histoires.

Je dois beaucoup à ce pays qui m’a profondément enrichi et aidé à prendre conscience d’énormément de choses. Je m’efforce à ma manière d'écrire une nouvelle histoire pour nos deux pays, faite de collaborations, de respect et d’entente.

Jobaga

Jobaga

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